« Agir concrètement avec tous les acteurs concernés »
L’AVCOI s’est lancée dans un vaste programme d’accompagnement des villes de l’océan Indien en matière de recyclage des déchets. Des diagnostics sont en cours de réalisation avant l’élaboration de plans d’actions.
Broyer les déchets plastiques puis les compacter pour fabriquer des pavés autobloquants. C’est l’un des projets d’Antananarivo, dans le but de remplacer le goudron pour améliorer les conditions de circulation dans la capitale malgache. Un exemple parmi d’autres des opportunités offertes par l’économie circulaire en matière de déchets. Depuis 2018, lors de la première édition des Assises de la Croissance Verte, organisées à La Réunion, les communes et collectivités de l’AVCOI travaillent sur cette thématique. Il faut dire que la question est prégnante : le volume des déchets augmente année après année : comment les collecter auprès des ménages et des entreprises, comment les trier, comment les valoriser et recycler, où les stocker… « Sur les îles, on manque de place, les déchets s’accumulent, posant des questions de salubrité », analyse Gilles Loir-Mongazon, secrétaire exécutif de l’AVCOI. Dans plusieurs territoires, les dépôts sauvages persistent. « C’est évidemment une question de moyens, mais aussi de volonté politique, de sensibilisation des populations ».
Prenant le sujet à bras le corps, les vingt-et-un membres de l’AVCOI ont alors signé, en 2022, une charte d’engagement en dix points. Le document a été complété l’année suivante, lors de la seconde édition des Assises de la Croissance Verte, à Mamoudzou (Mayotte), par une feuille de route « déchets ». En 2024, cette mobilisation se traduit par une phase plus opérationnelle, grâce à des financements du programme européen Interreg, mis en œuvre par la Région Réunion, et du fonds de coopération régionale, géré par la préfecture de La Réunion. Lydia Charlie, maire de Victoria et vice-présidente de l’AVCOI, s’en félicite, dans la mesure où « l’économie circulaire est encore en phase d’émergence aux Seychelles. Toute initiative ou réflexion sur ce sujet, visant à améliorer la gestion des déchets et à protéger l’environnement, est particulièrement bienvenue ». Bien qu’une première ébauche ait été amorcée par les ministères seychellois de la Pêche et de l’Économie Bleue, et de l’Environnement, avec notamment des subventions et solutions de financements, ou des échanges entre entrepreneurs, « aucune stratégie officielle et claire n’a encore été définie pour favoriser son développement ». L’élue espère, avec l’appui de l’AVCOI, qu’il sera « possible d’agir concrètement si tous les acteurs concernés s’unissent ».
Cela semble bien parti : en 2024, seize villes ont signé une convention de partenariat avec l’AVCOI et se sont notamment engagées à réaliser un diagnostic de territoire d’ici mars 2025. Combien de déchets sont produits chaque année, quels types de déchets, que deviennent-ils… Pour la première fois, des données chiffrées et comparables permettront d’établir un constat de la situation et de proposer des solutions. À Victoria, qui dispose d’une collecte quotidienne des déchets ménagers, les poubelles publiques permettent aux usagers de déposer leurs petits déchets. Lydia Charlie prévoit de mettre en place un système de tri, pour séparer notamment les contenants consignés des autres déchets. « Ce projet devrait se concrétiser l’année prochaine grâce à l’arrivée d’une nouvelle volontaire dans le cadre de notre partenariat avec la Ville de la Possession », prévoit la maire de la capitale seychelloise.
En attendant, trente-deux élus et techniciens, représentant les seize communes engagées dans le projet, ont été formés en septembre 2024 à Port-Louis (Maurice). Ce sont ces référents qui seront chargés de réaliser le diagnostic dans leur territoire. Tokoniaina Hobinjatovo a participé aux ateliers, qui se sont déclinés en fresque participative et en atelier d’intelligence collective. « On a notamment travaillé sur la notion de résilience climatique », raconte la directrice de l’Environnement de la commune d’Antsirabe, à Madagascar, qui a débuté le diagnostic de sa commune. « Il s’avère que la question des déchets est intimement liée à celle de la préservation de la biodiversité. Nous sommes très attachés à cette question ».
Les référents seront accompagnés tout au long du processus par des cabinets de conseils, comme Isodom, spécialisé dans la transformation digitale et environnementale, ou Utopio, qui promet de « booster les initiatives durables ». Fidèle à sa philosophie première, l’AVCOI favorise la réflexion en réseau. Pour découvrir les meilleures pratiques éventuellement transposables d’une île à l’autre, les référents sont amenés à se rencontrer en binômes lors de la réalisation des diagnostics. La première mission collaborative concerne un référent de Mamoudzou (Mayotte) en visite fin novembre 2024, à La Possession (La Réunion).
En avril 2025, une importante rencontre sera organisée à La Réunion, qui réunira l’ensemble des référents et des communes concernées, mais aussi des entreprises prestataires de service en matière de gestion des déchets. Durant deux jours de restitution, les villes présenteront chacune leur diagnostic chiffré ; la troisième journée, dite d’inspiration, abordera la thématique de la protection des océans, évidemment liée à la question des déchets. Enfin, une séquence formation, au dernier jour de la rencontre, permettra de former les participants à la rédaction d’un plan d’action. Car c’est là l’étape suivante du programme en cours. En juillet 2025, chaque commune devra proposer un plan d’action, véritable outil de programmation et de réalisations pour la gestion de ses déchets. Bien sûr, chaque territoire décidera de ses priorités, en fonction notamment des financements mobilisables, mais, qui sait, des solutions collectives entre les six îles pourraient être imaginées.
Partenaires financiers
- FCR974 (Fonds de Coopération Régionale – Préfecture de La Réunion)
- UE-Interreg (OI)
- Région Réunion
- AVCOI